La vérité sur les hypercholestérolémies familiales

A propos des hypercholestérolémies dites familiales, j’ai beaucoup écrit sur mon blog et dans mes  livres, notamment dans “Prévenir l’infarctus”, par exemple à la section Réponses à vos questions (pages 358 à 361).
Mais je vois bien que de nombreuses personnes et de nombreuses familles qui se pensent victimes d’une maladie héréditaire restent terriblement affectées et dans l’angoisse de leur futur, le leur et celui de leur descendance. Je le répète ici encore, ces familles sont surtout victimes d’une désinformation massive de la part des médecins qui se prétendent spécialistes des HF.
Il y a bien sûr quelques rares cas d’HF malignes avec des manifestations cliniques dès l’enfance (j’en parle un peu plus bas) ; mais il est faux de prétendre que le cholestérol en est responsable.
La désinformation commence avec l’appellation même d’Hypercholestérolémie Familiale [HF].
Autrefois, les troubles des lipides sanguins étaient classés selon la Classification dite de Fredrickson, qui est aujourd’hui plus ou moins abandonnée. A cette époque, le cholestérol n’était pas désigné dans la classification et les HF étaient classées principalement dans les Hyperlipoprotéinémies de type IIA.
Et une hyperlipoprotéinémie c’est différent d’une hypercholestérolémie qu’elle soit familiale ou pas ! Je simplifie au maximum car je ne suis pas en train de faire un cours de médecine.
Le coupable, si coupable il y avait, ne serait donc pas le cholestérol mais certaines lipoprotéines ; et ça change totalement le raisonnement. Car les lipoprotéines sont des énormes structures multimoléculaires qui contiennent (en faisant simple) des associations de lipides et de protéines, comme leur nom l’indique.
Parmi ces lipides, il y a du cholestérol certes, mais aussi d’autres lipides, des triglycérides, des phospholipides, des acides gras (beaucoup), des substances liposolubles de toutes sortes – les vitamines liposolubles, vitamines E et vitamines A (qui ont des propriétés antioxydantes), vitamines D (désormais impliquées dans le risque cardiovasculaire) et surtout les vitamines K, impliquées dans la coagulation et donc un risque cardiovasculaire direct – et même de complexes systèmes enzymatiques, les fameuses paraoxonases, par exemple, qui sont des systèmes antioxydants.
Ce sont aussi des repères à micro-organismes infectieux, notamment les virus de l’hépatite qui pénètrent dans le foie par effraction – comme des passagers clandestins – justement via les récepteurs des lipoprotéines. Les lipoprotéines sont des acteurs du système immunitaire qui est désormais considéré comme un facteur de risque cardiovasculaire majeur ; nous l’avons montré dans nos études chez les transplantés cardiaques [voir le chapitre 3 (Partie 1) de notre livre Prévenir l’infarctus et l’AVC].
Pourquoi fabriquons-nous des Hyperlipoprotéinémies, et familiales en plus ?
Du fait d’anomalies de structure plus ou moins aisément décelables – parfois génétiquement transmises, et donc partiellement héréditaires – de complexes moléculaires impliqués dans le trafic de ces lipoprotéines entre le sang circulant et les cellules.  En simplifiant – et selon la théorie actuellement prépondérante, mais qui pourrait évoluer – pour que ce trafic se fasse, il faut que des contacts s’établissent entre les cellules et les lipoprotéines ; et cela est possible grâce à des accrochages entre des protéines de la paroi cellulaire et des protéines de structure – appelées apoprotéines – de la lipoprotéine.
Des anomalies de ces protéines empêchent que de bons contacts se fassent et perturbent ce trafic : les lipoprotéines voient leur métabolisme être altéré et éventuellement (mais pas systématiquement) leur concentration dans le sang augmenter.
Nous sommes donc en présence de caractéristiques – voire de pathologies – métaboliques complexes où l’augmentation du cholestérol circulant n’est qu’un aspect latéral et probablement mineur. Faire dire à des personnes (ou des patients) qu’ils appartiennent à des “familles qui font du cholestérol” et qu’ils en sont malades est une simplification abusive, voire un mensonge honteux !
Dans les HF, ou plutôt les hyperlipoprotéinémies familiales, les anomalies – si ce sont vraiment des anomalies – sont des anomalies de protéines, et pas du cholestérol !
Certes une accumulation de lipoprotéines anormales dans le sang ou dans des tissus spécifiques peut constituer des maladies en relation soit avec des dépôts de ces lipoprotéines dans des sites incongrus, soit des altérations du métabolisme d’une des nombreuses substances présentes dans ces complexes multimoléculaires, des acides gras ou des vitamines spécifiques. Aucune donnée scientifique sérieuse ne permet de dire actuellement quelles sont les substances altérées réellement pathogènes.
Il y a bien des cas très exceptionnels où les concentrations sanguines de lipoprotéines peuvent devenir exceptionnellement élevées et il peut être utile de débarrasser ces patients de leurs lipoprotéines par des techniques de filtration du sang et de plasmaphérèse. Aucune donnée scientifique sérieuse ne permet de dire qu’en procédant ainsi on diminue le risque d’une pathologie quelconque. Dans ces cas extrêmes, les médicaments sont inefficaces, ce qui justifie encore ces techniques biologiques de filtration du sang.
Il y a aussi, parmi les patients porteurs des caractéristiques génétiques susceptibles de générer des hautes concentrations de lipoprotéines, certains d’entre eux qui ont aussi des caractéristiques génétiques qui favorisent la coagulation – et donc augmentent leur risque de thrombose – c’est fort bien documenté scientifiquement.
Ces malheureux peuvent – surtout s’ils n’ont pas un mode de vie protecteur – faire des complications cardiovasculaires, et ce n’est pas en diminuant leur cholestérol avec des médicaments qu’on peut leur rendre service.
Quand les médecins voient leur cholestérol élevé – qui est une conséquence de leur hyperlipoprotéinémie familiale – ils attribuent quasi automatiquement leurs complications cardiovasculaires à leur cholestérol alors que les vrais coupables sont le risque (génétiquement transmis) de thrombose et surtout leur mode de vie !
Comme avec les médicaments prescrits, le risque n’est pas modifié – à moins d’adopter un mode de vie protecteur – ces patients récidivent ; et s’ils survivent, les médecins leur augmentent les doses de médicaments anticholestérol, croyant bien faire …
La suite est connue : toxicité et inefficacité persistante …