ALERTE : les vieux ne sont pas des jeunes !
On dit « vieux » et « jeunes » dans le langage courant (sans que ce soit péjoratif) mais ça n’a pas beaucoup de sens car on est tous (ou toujours) le « vieux » ou le « jeune » de quelqu’un.
En médecine, la frontière entre les jeunes et les vieux se situe autour de 60 ou 65 ans et, au-delà de cet âge dit « canonique », on est un sénior plutôt qu’un « vieux ».
La médecine de précision (que je défends dans mes livres) se développe dans nos sociétés. Trop lentement certes mais quand même ; et sans dire son nom car cela reste compliqué pour les praticiens de base.
Cela rejoint l’idée basique développée précédemment que les femmes ne sont pas des hommes.
Sur ce dernier point, la frontière (si on laisse de côté les transgenres) est claire.
Pour le concept vieux/jeunes, c’est plus compliqué car fixer un seuil est dangereux du fait de l’extrême variabilité des individus.
Outre qu’un sénior homme n’est pas une sénior femme [c’est déjà une « colossale » différence), certains d’entre nous sont vieux « avant l’âge » comme on dit (au moins en apparence ; ce qui ne veut rien dire) tandis que d’autres semblent rester éternellement jeunes.
De ces faits évidents, vient la conséquence évidente (aussi) qu’énoncer des règles générales n’est pas évident (encore) !
Ce qui n’empêche pas des sociétés savantes prestigieuses – par exemple l’AHA (ou American Heart Association) – pour lesquelles je n’ai plus beaucoup de respect (tant les liens commerciaux sont devenus caricaturaux) de publier des recommandations que les praticiens de terrain seraient susceptibles de suivre très strictement pour s’éviter tout ennui juridique. Chacun des mots qui précèdent est important !

Dans ce cas, les experts se sont penchés (et ont beaucoup écrit) sur les techniques de revascularisation du myocarde et on mesure déjà l’ambiguïté (ou la naïveté intellectuelle) des rédacteurs qui parlent eux de « revasculariser » les artères coronaires ; ce qui n’a pas de sens puisque l’on veut apporter une nouvelle vascularisation (du myocarde) à la place des artères coronaires défaillantes.
Laissons cette question, quoique révélatrice, car elle n’est peut-être que lexicale dans la façon de penser des auteurs.
Il y a deux grandes techniques pour revasculariser le myocarde si je laisse de côté bien sûr l’abstention, c’est-à-dire ne rien faire sinon donner des médicaments : le stenting et la chirurgie de pontage.
Chez des personnes de plus de 65 ans ou de plus de 75 ans, on aura tendance spontanément à éviter la chirurgie de pontage qui signifie ouverture du thorax, circulation extra-corporelle et longue convalescence.
On préfèrera la mise en place de stent (après angioplastie), un ou plusieurs, car il suffit d’une anesthésie légère et tout peut se passer simplement par une ponction de l’artère radiale. L’inconvénient c’est que la revascularisation peut ne pas être optimale et que le risque (quoique minimisé) d’accidents cardiaques persiste.
Je ne vais pas rentrer dans le détail des procédures (et difficultés) techniques sachant qu’elles varient en fonction des individus. Chaque cas est un cas particulier qui doit être considéré de façon prudente et minutieuse en concertation étroite avec la personne et sa famille. Pas facile !
C’est le triomphe de la médecine de précision !
L’autre question majeure concernant les séniors est celle de l’abus médicamenteux.
Qu’il s’agisse des plus de 65 ans ou des plus de 75 ans, la médecine moderne a la forte tendance à penser que plus il y a des prescriptions – plus de médicament consommés – et mieux le patient est soigné.
La pratique quotidienne indique le contraire. Si certains médicaments sont utiles voire indispensables chez certains séniors, moins il y en a et mieux c’est car moins il y en a et plus on s’évite une profusion d’effets indésirables !
Des auteurs intelligents (ça existe) ont posé cette question de façon judicieuse en se demandant quelles étaient les priorités dès qu’on se demandait quel(s) médicament(s) on allait déprescrire chez un individu donné ; en particulier chez les séniors.

A mon avis, à ce que je constate quotidiennement ou presque, l’abus médicamenteux chez les séniors est une constante dans la pratique clinique et les médecins sont terrorisés à l’idée qu’on puisse leur reprocher d’avoir induit une complication chez un de leurs patients à cause d’une déprescription.
En conséquence, on préfère le statu quo en se disant qu’en cas de complication, on était innocent puisque on avait fait de son mieux en prescrivant des médicaments ou, au moins, en ne déprescrivant pas !
Loin de moi l’idée de faire la leçon à quiconque mais il faut comprendre que pratiquer la médecine est un métier dangereux ; non seulement pour soi-même mais aussi pour ses patients !
Il y a un remède simple pourtant pour s’éviter des ennuis (juridiques ou éthiques), c’est de pratiquer la médecine de précision.
Une des règles fondamentales de cette dernière est d’informer pleinement les patients (et leurs familles éventuellement) et ensuite de partager la décision de déprescrire avec ces derniers.
C’est en pleine conscience, et de façon concertée, que le médecin et son patient prendront la décision de stopper une (ou plusieurs) prise(s) médicamenteuse(s).
Dans mon expérience, les résultats sont toujours favorables si la déprescription est intelligente et que le patient a bien compris les avantages et les rares mais possibles inconvénients de cette déprescription.
Conclusion : j’ai ici surtout parlé de prévention cardiovasculaire, chacun l’aura compris.
Mais c’est aussi valable pour d’autres domaines de la médecine ; en particulier pour la médecine des vaccins, un type de médecine où l’hésitation est grandissante !
Là aussi, les vieux ne sont pas des jeunes !
Laisser un commentaire