LE DEBAT SUR LA TRANSPARENCE DES ESSAIS CLINIQUES FAIT RAGE !

Je l’ai assez dit ici, nous ne pouvons pas croire « sur parole » les rapports de l’industrie pharmaceutique sur ses propres produits.
Je ne suis pas le seul à le dire ; à tel point que l’Agence Européenne du Médicament (EMA) négocie actuellement et durement (un pas en avant, un pas en arrière) une réforme radicale des procédures d’analyse des essais cliniques qu’on peut résumer, pour faire simple, sous le terme « transparence » !
Pour avoir une idée des discussions actuelles concernant la validité des essais cliniques – et donc la possibilité de vérifier le contenu des bases de données, ce que l’on appelle la « transparence des données scientifiques » – sans se perdre dans les labyrinthes de la bureaucratie européenne [qui fait d’ailleurs bien plus en termes de transparence que ses équivalents aux USA ou en Asie], je recommande la lecture (en anglais, désolé) de ça :
http://www.ema.europa.eu/ema/index.jsp?curl=pages/special_topics/general/general_content_000555.jsp&mid=WC0b01ac0580607bfa
Mais surtout ça :
http://www.plosmedicine.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pmed.1001202
Nous – c’est-à-dire quelques experts libres et indépendants – devons avoir accès à toutes les données brutes de chaque patient inclus dans un essai clinique de façon que nous puissions, par nous-mêmes, refaire tous les calculs statistiques qui soutiennent les conclusions de l’industriel et de l’Agence Officielle (FDA aux USA, EMA en Europe, par exemple) qui – je ne plaisante pas – valide ces conclusions sur la base des données fournies par l’industriel.
Rien n’oblige un industriel à montrer – laisser voir – l’intégralité du contenu de ses bases de données !
A ma connaissance, il n’y a pas en France  (ailleurs que sur ce Blog) de discussion avérée – c’est-à-dire plus ou moins officielle ou publique – sur ces sujets cruciaux. Silence, on dort ! Ne pas dérangez !
Sauf, évidemment, des tentatives d’enfumage venant des professionnels du secteur [  » touche pas à mon business, petit !  » ]. Par exemple, ça :
http://biopharmanalyses.fr/cro-les-entreprises-de-la-recherche-clinique-garants-de-la-transparence/
Si vous avez vent de quelque chose d’indépendant et concret, merci de me dire !
En bref, les industriels du secteur sont en général contre la transparence quoique certains fassent semblant de s’y soumettre [la Société du Spectacle dans toute sa splendeur …] pour mieux y échapper : les données brutes bien sûr, mais seulement celles qui ne portent pas [vraiment pas du tout] préjudice à nos sociétés industrielles … et aux profits qu’elles génèrent !
Il est évident qu’avoir « accès aux données brutes » ne suffit pas !
Il faut aussi que nous puissions vérifier la validité de ces données dites « brutes », celles à partir desquelles nous faisons les analyses !
Qu’est-ce que cela veut dire ?
Beaucoup de choses, mais pour expliquer, je vais donner un exemple simple.
Soit un essai clinique testant un médicament supposé diminuer le risque d’infarctus du myocarde. Dix mille (10,000) patients sont recrutés et répartis à l’aveugle dans un groupe traité et un groupe recevant le placebo. Après x années de suivi, les investigateurs déclarent qu’il y a eu 100 infarctus dans le groupe placebo et 50 dans le groupe traité avec le nouveau médicament : une réduction de 50% du risque ! Magnifique ! Ces chiffres sont donnés à titre d’illustration, ne pas raisonner dessus, bien sûr !
Avoir accès aux données brutes (vu par une Agence du Médicament), c’est avoir accès aux 150 dossiers (anonymisés) des patients qui ont présenté un infarctus, puis aux calculs statistiques présentés par l’industriel.
Ça ne suffit pas évidemment !
Il faut aussi pouvoir vérifier qu’il n’est vraiment rien survenu chez les 9850 patients qui n’ont pas eu, selon l’industriel, un infarctus !
Ça tombe sous le sens !
Soit nous faisons confiance et les 150 dossiers d’infarctus sont de peu d’intérêt. Soit nous ne faisons pas confiance [« chat échaudé …« ] et il faut pouvoir vérifier dans les deux groupes si le ratio infarctus/indemnes est correctement rapporté.
En effet, s’il est impossible d’inventer des infarctus dans le groupe recevant le placebo, il est vraiment trop facile « d’oublier » quelques infarctus dans le groupe traité …
Et il ne faut pas se plaindre qu’on ne soit pas en confiance ; ils ont été prévenus qu’on ne les croyait plus … sauf ceux qui sont payés pour les croire sur parole ! Triste époque !
Honte sur eux !
Tout ceci pour parler des éventuels effets bénéfiques d’un quelconque médicament.
On peut imaginer à quel degré de tartufferie peut donner lieu l’examen des effets toxiques d’un médicament.
Je donne ci-dessous un exemple de rapport de l’Agence Européenne concernant l’effet pro-cancer des certains médicaments antihypertenseurs que j’ai discutés dans des billets précédents :
http://www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Medicine_QA/2011/10/WC500116862.pdf
J’étouffe ! A l’aide !
Bon, « on n’est pas sorti du sac » … mais (soyons positif !) ça progresse puisque ça discute …
Le chemin parcouru nous donne quand même une petite idée de « d’où l’on vient » !
Il y avait de quoi s’alarmer ! Il était temps ! Je n’ai pas perdu mon temps !
Que penser aujourd’hui de toutes les canailles (dans les médias et les académies, ici ou là) qui, au lieu de mêler leurs voix à la nôtre – pour le progrès de l’humanité, pas moins ! – nous traitaient de parano ou de mal-élevés ?
On discute donc  ces jours-ci des réformes à apporter à un système qui est mort et qu’il faut enterrer …
Admettons maintenant que nous fassions d’ici peu de réels progrès dans la transparence, que ferons-nous de tout ce qui a précédé ces réels progrès ? Quand nous vivions dans l’obscurité …
Que ferons-nous de toutes ces « merveilles » – devant lesquelles se prosternent encore les médias et les académiciens de tout poil aujourd’hui – et qui motivent pourtant (au niveau de l’Agence Européenne du Médicament !) l’impérieuse nécessité de changer les procédures et d’imposer la transparence ?
On repart à zéro avec les statines ?
Bien sûr !
Bonjour chez vous !