Les inénarrables aventures des graisses saturées en compagnie des maladies cardiovasculaires

Il y faudrait un livre pour tout dire.
J’en ai déjà écrit plusieurs (livres) où je traitais ce sujet mais c’est une histoire sans fin, au rythme de défis commerciaux répétés.
Je vais faire simple.

On appelle graisses saturées des acides gras qui ne comportent aucune double liaison entre les atomes de carbone. A une extrémité, il y a une fonction acide ; donc ce sont des acides, point crucial !
Autre point crucial : les membranes cellulaires riches en acides gras saturés sont plus rigides que celles qui en sont (relativement) pauvres.

Les graisses saturées ont longtemps été vues comme des graisses animales (produits laitiers, viande de porc et de bœuf…), elles sont donc de longue date condamnées par les végétariens.

Elles sont associées à des substances spécifiquement animales, comme le cholestérol et quand on consomme des graisses saturées, on a tendance à augmenter son cholestérol.

Dans l’univers simpliste de la médecine conventionnelle, on fait ainsi l’amalgame entre graisses saturées, graisses animales et cholestérol !

Et comme, dans cette médecine archaïque, le cholestérol est un ennemi de l’humanité, les graisses saturées le sont aussi !

Dans des études épidémiologiques bien conduites, on a montré une association positive entre la quantité de graisses saturées dans l’alimentation et le risque de maladies cardiovasculaires (MCV). Et donc, le cholestérol aussi ; bien que son association avec les MCV soit plus difficile, voire impossible, à démontrer.

Par opposition, les graisses végétales sont pauvres en acides gras saturés et riches en polyinsaturés.

Quand on consomme beaucoup de graisses végétales, à la place des graisses animales, le cholestérol dans le sang semble diminuer. On a essayé de faire croire que dans ce cas, le risque de MCV diminue mais les essais cliniques ont échoué à convaincre et les théories associant « graisses végétales, cholestérol abaissé et faible risque cardiovasculaire » sont aujourd’hui abandonnées.

Une des principales études qui ait contribué à faire rejeter cette théorie est la Lyon Diet Heart Study dans laquelle on montrait [j’en étais le principal investigateur] que l’adoption d’une diète méditerranéenne permettait une diminution de 70% du risque cardiovasculaire sans modifier le niveau de cholestérol dans le sang.
Dans cet essai clinique, nous avions pourtant une diminution très significative des graisses saturées mais sans demander aux patients d’être végétariens.

Cette étude indiquait qu’on pouvait diminuer considérablement le risque cardiovasculaire sans réduction du cholestérol, sans être végétarien et sans augmenter la consommation de graisses végétales polyinsaturées.

A condition de diminuer la consommation de graisses saturées ; et cela dans un contexte de diète méditerranéenne qui est non végétarienne mais riche en huile d’olive !

Il était donc important de dissocier la question des graisses saturées de celle du cholestérol.

Mais beaucoup n’ont pas compris. Puisqu‘on innocentait le cholestérol, ils pensaient que par la même occasion on innocentait les graisses saturées et que l’important était d’éviter les graisses saturées animales.

Et ainsi de nouvelles actrices sont montées sur la scène en essayant de devenir des stars : les graisses saturées végétales.

En peu de temps, et par un phénomène dont l’économie capitaliste a le secret, les huiles (tropicales) de coco et de palme se sont faites une place au soleil.

Des nutritionnistes chevronnés et des grands chefs ont fait la promotion de ces nouvelles huiles, en parallèle avec une condamnation des hydrates de carbone et des sucres.

Puisque les aliments riches en hydrates de carbone (surtout ceux avec un index glycémique élevé) étaient supposés responsables de l’épidémie d’obésité et de diabète, il était crucial d’en réduire la consommation. Mais il fallait les remplacer par quelques aliments porteurs de calories.

Comme les graisses saturées animales et les graisses végétales polyinsaturés (maïs, tournesol) étaient encore suspectes, les graisses végétales saturées sont devenues soudainement la solution miracle.
Mais le miracle fut de courte durée car les huiles de palme ont été condamnées par les écologistes parce que la culture intensive des plantes qui en permettent la production est un désastre environnemental.
La remise en question de l’huile de coco a pris un peu plus de temps mais son avenir commercial semble désormais (Juin 2020) compromis.

Je ne discuterai pas ici les motivations des uns et des autres pour encenser un jour (et rejeter un autre jour) les graisses saturées animales ou végétales.

Mais je comprends que certains visiteurs de ce blog voudraient en savoir un peu plus, au moins pour les aider à prendre décision concernant leur propre consommation.

Ce n’est pas le seul type d’aliments ou de nutriments qui nécessiteraient une longue discussion et une plongée dans les archives. Je ne peux pas tous les discuter ; je renvoie à mes livres de nutrition.

Mais il y a une façon simple de procéder en posant une question simple : est-ce que les populations protégées des MCV consomment beaucoup de graisses saturées ? Animales ? Végétales ?
Quelle(s) population(s) ?
Les populations méditerranéennes et japonaise (surtout à Okinawa) étant nos références, quelles doit être la réponse ?

Ces populations protégées consomment peu de graisses saturées animales et végétales ! « Peu » ne veut pas dire « pas du tout » !

Facile la médecine scientifique !

Bon appétit !